Quand le roi du désert se tourne vers l’océan

L’image du « roi de la jungle » rôdant dans la savane à la recherche d’une gazelle est universelle. Mais en Namibie, ce cliché ancestral est en train d’être bouleversé. Sur la célèbre et inhospitalière Côte des Squelettes, un petit clan de lions a abandonné les sables ardents du désert du Namib pour les embruns froids de l’Atlantique. Ce sont, à ce jour, les seuls « lions maritimes » reconnus au monde.
Contraints par le changement climatique et la raréfaction des proies terrestres, ces prédateurs se sont lancés dans une mutation écologique fascinante, mais périlleuse. Leur nouvelle stratégie de survie ? Tirer parti des abondantes ressources que leur offre la mer.
Chasse aux otaries et aux cormorans

Pour ces félins, le changement de régime alimentaire a été radical. Les traditionnels springboks et autres antilopes, dont la population a fortement diminué dans le désert, ont été remplacés dans leur menu par la faune côtière. Désormais, ces lions traquent otaries à fourrure, flamants roses et cormorans.
Cette adaptation spectaculaire est suivie de près par la photographe belge Griet Van Malderen, qui a réussi à immortaliser l’intensité de cette existence sur le fil. Elle documente, au travers de ses clichés, la résilience et l’ingéniosité dont fait preuve ce petit groupe pour subsister dans un environnement qui n’est, au départ, pas le leur.
Gamma, symbole d’une nouvelle génération
L’une des images les plus parlantes de ce phénomène, très remarquée au concours du Wildlife Photographer of the Year, met en scène la lionne Gamma. Sur cette photographie, la prédatrice garde farouchement la carcasse d’une otarie du Cap sur une plage de galets, le regard perdu vers les vagues qui déferlent.
Gamma incarne la résilience brute que nécessite cette nouvelle vie. Âgée d’environ trois ans et demi, elle fait partie de la première génération née de cette migration. Selon les observations de Griet Van Malderen, cette chasseuse est capable de neutraliser jusqu’à quarante proies en une seule nuit, preuve que l’instinct de survie est plus fort que le confort habituel de l’espèce.
Poussés par la sécheresse et le combat permanent

« La vie est une question de survie, la lutte est permanente », confiait Griet Van Malderen à la chaîne britannique BBC. La photographe insiste sur le fait que c’est bien le stress hydrique et le manque de ressources sur terre qui ont poussé ces lions à s’adapter de manière si extraordinaire. C’est un clan minuscule – seulement douze individus sur les quatre-vingts que compte le désert du Namib – qui a choisi de s’installer durablement au bord de l’eau depuis 2015.
Cette incursion côtière n’est cependant pas une première historique. Dans les années 1980, une population de lions occupait déjà la Côte des Squelettes, avant d’être décimée par une grande sécheresse et des conflits avec les éleveurs. Trente ans plus tard, ils ont retrouvé leur chemin, au grand soulagement de l’expert Philip Stander.
Un territoire immense, mais fragile

Philip Stander, qui a fondé le *Desert Lion Conservation Trust* en 1997, se réjouit de ce retour dans ce qu’il décrit comme « le terrain le plus inhospitalier que l’on puisse imaginer : une immense mer de dunes de sable ». Ce petit groupe bénéficie d’un territoire de chasse incroyablement vaste, s’étendant sur près de 17 000 km² de côtes, offrant un luxe d’espace que n’ont pas leurs cousins africains, souvent confinés dans des parcs nationaux plus restreints.
Malgré l’étendue du territoire, la cohabitation avec les humains reste un défi crucial. Pour minimiser les risques de conflits avec les touristes et les rares habitants, les gardes forestiers ont dû innover. Ils utilisent notamment des outils de dissuasion discrets, comme des alarmes virtuelles ou des feux d’artifice, pour éloigner les lions des zones habitées.
Donner une chance aux animaux de se rétablir

L’histoire de ces douze lions n’est pas seulement un fait divers zoologique ; elle est une puissante illustration de la pression environnementale subie par la faune africaine. Elle met aussi en lumière la capacité d’adaptation extraordinaire du règne animal, lorsqu’il est acculé.
Pour la photographe, le rôle du public est essentiel : « Plus il y aura de gens qui connaîtront l’existence de ces lions, mieux nous pourrons les protéger. » Et Philip Stander de conclure, avec un optimisme ancré dans l’observation de la nature : « Les animaux ont la capacité de se rétablir, de retrouver la beauté et la force qui les caractérisent. Il faut simplement leur en donner la chance. »
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