Une nouvelle vision de l’activité cérébrale : les « neurones noyaux » changent la donne
Auteur: Mathieu Gagnon
Quand le cerveau nous joue des tours

Depuis des siècles, les neuroscientifiques s’arrachent les cheveux — façon de parler, bien sûr — pour tenter de comprendre comment notre cerveau, cette machine incroyablement complexe, parvient à gérer autant de capacités avancées. On sait aujourd’hui que le cortex cérébral, cette couche externe du cerveau, est le grand responsable. C’est lui qui gère le raisonnement, la prise de décision, le traitement des infos sensorielles et nos mouvements volontaires. Rien que ça ! Or, les neurones de ce cortex s’activent souvent de manière consécutive ou simultanée sur de brèves périodes, suivant ce qu’on appelle des modèles d’activité récurrents. C’est un peu comme une danse bien orchestrée.
Ces schémas de tir neuronal récurrents, on les a liés à la coordination sensorimotrice, c’est-à-dire la capacité du cerveau à relier ce qu’il voit ou sent (les entrées sensorielles) aux mouvements du corps. Pendant des décennies, pour expliquer ce phénomène de répétition, on s’est appuyé sur la théorie de la dynamique des attracteurs. C’est un cadre basé sur la physique qui voit ces schémas comme des « attracteurs », des états stables vers lesquels le système revient naturellement, un peu comme une bille qui redescend toujours au fond d’un bol.
On supposait jusqu’ici, peut-être un peu trop vite, que ce retour aux mêmes schémas provenait de connexions très fortes entre les mêmes neurones. On imaginait des groupes de neurones agissant comme des unités de « complétion de modèle ». En gros, l’idée était que si une partie du groupe s’allumait, le reste suivait automatiquement pour recréer le motif complet. Mais voilà, une nouvelle étude vient bousculer cette certitude bien ancrée.
Une analyse massive qui rebat les cartes

C’est là que les chercheurs de l’Institut des Neurosciences de Paris-Saclay, ou NeuroPSI pour les intimes, entrent en scène. Ils ont récemment rassemblé de nouvelles preuves qui remettent sérieusement en question cette histoire d’attracteurs et de complétion de modèles. Ils proposent une explication alternative pour ces schémas de tir répétitifs dans le cortex. Pour y parvenir, ils n’ont pas fait les choses à moitié. Ils ont analysé une quantité impressionnante de jeux de données, ou datasets, liés au cerveau et accessibles au public.
Ces données proviennent de sources très sérieuses et ont été collectées via diverses techniques d’imagerie, des outils de microscopie et des méthodes de détection de l’activité électrique. Pour être tout à fait précis — et c’est important de rendre à César ce qui est à César —, ils ont utilisé les données publiées par le projet MICrONS, l’Allen Brain Observatory, le laboratoire Goard, le laboratoire Svoboda et enfin CortexLab. C’est un travail de compilation titanesque, vous imaginez bien.
En décortiquant tout ça, l’équipe a d’abord identifié ces fameux modèles d’activité répétitifs dans le cortex. Ensuite, ils ont cartographié les connexions entre les neurones. Et c’est là qu’ils ont cherché à voir si les neurones qui s’activaient souvent ensemble étaient fortement connectés, comme le voulait la théorie classique. Eh bien, surprise ! Dans leur papier publié dans Nature Neuroscience (2025, DOI: 10.1038/s41593-025-02128-5), les auteurs Domenico Guarino, Anton Flipchuk et Alain Destexhe écrivent noir sur blanc : « En utilisant des jeux de données multimodaux — incluant l’imagerie à deux photons, l’électrophysiologie et la microscopie électronique — nous montrons que ces modèles reproductibles n’impliquent pas de neurones fortement interconnectés ».
Les neurones noyaux : les nouveaux chefs d’orchestre

Alors, si ce n’est pas une histoire de connexions super fortes, comment ça marche ? Guarino, Flipchuk et Destexhe avancent une hypothèse fascinante. Plutôt que d’être organisés en unités qui complètent des motifs, les réseaux corticaux présenteraient une modularité hiérarchique. Imaginez des modules connectés à ce qu’ils appellent des « neurones noyaux » (ou core neurons). Ces neurones particuliers serviraient de nœuds à haut débit d’information, placés pile aux interfaces des modules. Ils canalisent l’activité, un peu comme des aiguilleurs du ciel, mais — et c’est le détail qui tue — ils n’ont pas la signature structurelle des unités de complétion de modèle qu’on trouve typiquement dans les réseaux attracteurs.
Pour vérifier leur intuition, les chercheurs ont aussi utilisé des modèles et outils informatiques pour simuler des réseaux neuronaux. Ils voulaient mieux comprendre les dessous de ces schémas récurrents observés partout dans le cortex cérébral. Leurs simulations indiquent que ces modèles émergent plus probablement de l’activité de ces « neurones noyaux » qui agissent comme des « hubs », faisant passer l’information entre différents « modules » de neurones qui, eux, sont plus fortement connectés entre eux.
Les auteurs précisent : « En utilisant des modèles informatiques, nous trouvons que la connectivité dépendante de la distance est nécessaire et suffisante pour produire la modularité et les événements reproductibles transitoires observés dans le cortex ». En somme, nos réseaux corticaux seraient préconfigurés pour soutenir la coordination sensorimotrice. C’est une redéfinition complète de la base structurelle et dynamique de l’activité corticale, qui met l’accent sur le lien entre la structure modulaire et la fonction.
Conclusion : Vers une nouvelle compréhension du cerveau

Les résultats de cette étude récente semblent remettre en cause une interprétation de longue date, je dirais même un dogme, concernant l’activité corticale récurrente. Bien sûr, comme toujours en science, il faudra d’autres expériences et analyses pour valider totalement l’hypothèse de l’équipe de NeuroPSI. Mais si cela se confirme, cela pourrait approfondir considérablement notre compréhension actuelle du cerveau et de la manière dont il coordonne les informations sensorielles avec le mouvement. C’est fondamental.
Si cette nouvelle explication est validée, elle pourrait avoir des implications majeures, par exemple pour l’étude du développement cérébral ou pour comprendre certains troubles caractérisés par une mauvaise coordination sensorimotrice. Et ce n’est pas tout ! Cela pourrait potentiellement informer le développement de nouveaux types de réseaux neuronaux artificiels, ces modèles informatiques inspirés par l’organisation et le fonctionnement du cerveau. On est peut-être à l’aube d’une petite révolution, qui sait ?
Ce contenu a été créé avec l’aide de l’IA.