Un méga-tsunami de 200 mètres détecté par satellite a généré des ondes sismiques pendant neuf jours
Auteur: Mathieu Gagnon
Une énigme sismique venue du grand Nord

C’est le genre d’histoire qui, je l’avoue, donne un peu le vertige. D’habitude, la côte est du Groenland est un endroit plutôt tranquille, figé dans la glace et le silence. Et puis, sans crier gare, les sismographes du monde entier se sont affolés. Mais pas de la manière habituelle, non… Ce n’était pas le gribouillage frénétique d’un tremblement de terre classique. C’était autre chose. Les instruments, de l’Alaska jusqu’à l’Australie, se sont mis à clignoter à l’unisson, enregistrant un rythme lent et régulier qui a duré – tenez-vous bien – neuf jours entiers.
Imaginez un peu la scène : une pulsation qui monte et descend toutes les quatre-vingt-douze secondes, comme un métronome géant. C’était un grondement trop doux pour que nous, pauvres humains, puissions le sentir sous nos pieds, mais suffisamment puissant pour faire trembler le substrat rocheux aux quatre coins de la planète. Franchement, aucun séisme « normal » ne se comporte comme ça. Les scientifiques, un peu perdus au début, ont fini par relier ce signal étrange au fjord Dickson au Groenland. C’est un passage étroit, coincé entre des falaises vertigineuses de près de 900 mètres (3 000 pieds). En regardant les nouvelles images satellites, ils ont vu une cicatrice béante là où une partie de la montagne avait tout simplement disparu. Quelque chose de colossal avait frappé l’eau.
Le jour où la montagne est tombée : un tsunami de 200 mètres

Alors, que s’est-il passé exactement ce 16 septembre 2023 ? Eh bien, c’est terrifiant. Plus de 25 millions de yards cubes de roche et de glace se sont détachés. Pour vous donner une idée, c’est assez pour remplir 10 000 piscines olympiques ! Tout ce bloc a plongé dans le fjord Dickson avec une violence inouïe. L’impact a soulevé une vague gigantesque, un méga-tsunami atteignant environ 650 pieds de haut (près de 200 mètres). C’est difficile à imaginer, n’est-ce pas ? Cette masse d’eau a dévalé le corridor de deux miles, a rebondi sur le promontoire et est revenue en arrière, détruisant au passage pour environ 200 000 dollars d’équipement dans un poste de recherche vide sur l’île d’Ella. Heureusement qu’il n’y avait personne.
Mais l’eau ne s’est pas calmée après le premier passage. C’est là que ça devient curieux. Elle a commencé à osciller d’un mur à l’autre, un mouvement que les savants appellent une « seiche ». Les modèles informatiques ont montré plus tard que la surface montait de 30 pieds puis redescendait d’autant, dans ce rythme régulier qui appuyait sur le fond marin comme un piston géant. C’est ce battement de cœur, si je puis dire, qui a été capté partout. Contrairement au chaos d’un séisme, ce signal formait des pics lisses espacés d’une minute et demie, et il a à peine faibli pendant près de deux semaines. Personne n’avait jamais vu une signature mondiale aussi persistante causée par une seiche. Bon, il y a eu un petit désaccord entre les chercheurs sur la hauteur du clapotis résiduel – un groupe disait 8 pieds et demi, l’autre estimait entre 23 et 30 pieds – mais tous étaient d’accord sur la source : ce glissement de terrain monumental.
Une enquête mondiale et les dangers du réchauffement

Il a fallu une véritable armée de cerveaux pour comprendre ce phénomène. Plus de soixante-dix chercheurs issus de quarante-et-une institutions se sont penchés sur le mystère. Alice Gabriel, de l’Institut d’océanographie Scripps, a avoué que c’était un sacré défi de simuler par ordinateur un tsunami qui clapote aussi longtemps. Kristian Svennevig, du Service géologique du Danemark et du Groenland, racontait que tout le monde était perplexe au départ. « Personne n’avait la moindre idée de ce qui causait ce signal », disait-il. C’est rassurant, quelque part, de voir que la nature peut encore surprendre les experts, non ? Ils ont dû combiner des observations sur le terrain – en mesurant les entailles fraîches sur les falaises – et des supercalculateurs pour recréer le trajet de l’avalanche.
Mais il y a un fond plus sombre à cette histoire. Pourquoi la montagne est-elle tombée ? La glace qui soutenait la pente a fondu. L’air se réchauffe, l’océan aussi, et ça ronge les supports naturels. Comme le note Alice Gabriel, le changement climatique modifie ce qui est « typique » sur Terre et déclenche des événements inhabituels. Ce n’est pas la première fois, hélas. En 2017, dans le fjord Karrat, une instabilité similaire avait causé un tsunami mortel, détruisant onze maisons et coûtant la vie à quatre personnes. Le fjord Dickson, lui, est proche d’une route de croisière populaire. Aucun passager n’était là l’an dernier, dieu merci, mais l’épisode souligne les risques croissants alors que le tourisme arctique se développe. Les autorités réfléchissent maintenant à des systèmes d’alerte précoce mêlant satellites et données sismiques en temps réel.
La technologie spatiale : nos yeux dans le ciel

C’est là que la technologie moderne entre en jeu, et c’est assez fascinant. Les altimètres radar classiques ne voient qu’une fine ligne sous le satellite. Mais la mission SWOT (Surface Water and Ocean Topography), lancée en décembre 2022, change la donne. Elle cartographie une bande de 30 miles de large avec une résolution incroyable de 8 pieds. Thomas Monahan, de l’Université d’Oxford, explique que le changement climatique provoque des extrêmes sans précédent, surtout dans des endroits reculés comme l’Arctique où on ne peut pas mettre des capteurs partout. SWOT est une véritable percée pour étudier ces fjords.
Le professeur Thomas Adcock, lui aussi d’Oxford, remarque que ces données satellites avancées permettent enfin d’éclairer des phénomènes qui nous échappaient depuis des années. On commence à mieux comprendre les tsunamis, les ondes de tempête et ces fameuses vagues scélérates. Les chercheurs fouillent maintenant dans les archives sismiques pour voir si d’autres « pouls lents » similaires ont eu lieu dans le passé, cachant peut-être des catastrophes naturelles qu’on avait ratées. Comme le dit si bien Carl Ebeling de Scripps : « L’essence de la science est d’essayer de répondre à une question dont nous ne connaissons pas la réponse ». Chaque découverte affinera nos modèles sur la façon dont les pentes cèdent et comment l’eau réagit. De meilleures prévisions pourraient un jour offrir quelques minutes d’avance critiques pour les navires. Même les coins les plus calmes de notre planète méritent qu’on les écoute un peu plus attentivement, vous ne croyez pas ?
Ce contenu a été créé avec l’aide de l’IA.