
Dans un monde où l’information est omniprésente, il devient paradoxal de constater que de plus en plus de personnes rejettent les faits scientifiques au profit de théories du complot. Pourquoi certaines personnes préfèrent-elles nier les avancées scientifiques et croire à des explications souvent farfelues ? Des chercheurs ont récemment mis en lumière un facteur surprenant qui pourrait expliquer ce phénomène : la rancune. Cette émotion, souvent associée à des frustrations personnelles, jouerait un rôle clé dans l’adhésion aux théories du complot et dans le rejet de la science.
1. Qu’est-ce qu’une théorie du complot ?

Les théories du complot sont des croyances selon lesquelles des événements importants seraient manipulés en secret par des groupes puissants et malveillants. Contrairement aux explications basées sur des faits et des preuves, ces théories s’appuient sur des suppositions souvent peu plausibles et difficiles à vérifier. On retrouve ces idées dans de nombreux domaines : certaines personnes affirment que l’homme n’a jamais marché sur la Lune, que les vaccins sont dangereux ou encore que le changement climatique est un mensonge fabriqué par des élites.
2. Pourquoi certaines personnes rejettent la science ?

Le rejet de la science est souvent enraciné dans une profonde méfiance envers les institutions et les experts, perçus comme déconnectés des préoccupations du grand public. Pour beaucoup, la science apparaît comme complexe, réservée à une élite intellectuelle, et parfois même manipulée par des intérêts cachés. Cette perception crée un fossé entre les connaissances scientifiques et l’expérience quotidienne des individus, rendant certaines vérités difficiles à accepter.
Lorsqu’une découverte ou un fait établi entre en contradiction avec les croyances personnelles, les valeurs culturelles ou les convictions politiques, il peut être plus confortable de le rejeter plutôt que de remettre en question sa vision du monde. Un exemple frappant est le changement climatique, dont la réalité est confirmée par un consensus scientifique massif, mais qui continue d’être nié par de nombreuses personnes. Certains refusent d’en admettre l’existence non pas par manque d’informations, mais parce qu’accepter cette réalité impliquerait de repenser leur mode de vie, leur consommation ou leur confiance envers les décisions gouvernementales.
Ainsi, le rejet de la science ne repose pas uniquement sur un manque de compréhension, mais aussi sur un mécanisme de défense psychologique qui permet de préserver une certaine stabilité cognitive face à des vérités inconfortables.
3. La rancune : un moteur insoupçonné du complotisme

Selon les chercheurs David Gordon et Megan Birney, la rancune joue un rôle central dans l’adhésion aux théories du complot. Lorsqu’un individu se sent marginalisé, ignoré ou victime d’injustice, il développe un sentiment de frustration qui alimente sa méfiance envers les institutions et les sources officielles d’information. Se sentant en décalage avec la société, il peut chercher des explications qui lui permettent de rationaliser son ressenti, même si celles-ci vont à l’encontre des faits établis.
Cette rancœur devient alors un terreau fertile pour les croyances complotistes. Plutôt que d’accepter une vérité qui le place en position d’impuissance, l’individu va privilégier des récits qui lui redonnent un certain contrôle sur sa perception du monde. Ces théories, souvent construites autour de figures d’ennemis invisibles et de manipulations secrètes, lui offrent une explication rassurante : il n’est pas seul à être victime, mais bien une partie d’un groupe lésé par un pouvoir caché.
En définitive, la croyance aux théories du complot n’est pas seulement une question de désinformation, mais aussi une réponse émotionnelle à un profond sentiment d’exclusion et d’injustice.
4. Une étude qui met en évidence le lien entre rancune et complots

Pour vérifier cette hypothèse, les chercheurs ont réalisé une série d’études impliquant 1 000 participants afin d’examiner le lien entre la rancune et l’adhésion aux théories du complot. Les résultats ont révélé que plus une personne nourrit de la rancune, plus elle est susceptible de croire aux complots, même lorsque ces derniers manquent de fondements logiques ou scientifiques.
L’étude a également mis en lumière une tendance inquiétante : ces individus rejettent plus facilement les faits établis par la science, considérant que les experts et les institutions scientifiques manipulent délibérément l’information pour servir des intérêts cachés. Ainsi, plutôt que d’analyser les preuves objectives, ils adoptent une posture défensive qui alimente la méfiance et renforce leur conviction que la vérité leur est dissimulée.
Ce mécanisme crée un cercle vicieux : plus une personne ressent du ressentiment, plus elle se méfie des faits scientifiques et adhère à des narrations alternatives, ce qui accentue encore davantage son rejet des connaissances officielles et des autorités en place.
5. Un sentiment d’injustice et d’exclusion

Les résultats de cette recherche montrent que la croyance aux théories du complot est souvent alimentée par un sentiment d’injustice et d’exclusion. Les personnes qui se sentent défavorisées socialement ou économiquement sont plus susceptibles d’adopter une posture méfiante envers les autorités et les experts. Pour elles, croire en un complot leur permet d’expliquer leur situation et de donner du sens à leur ressentiment.
6. Comment lutter contre la désinformation et la méfiance ?

Les chercheurs insistent sur le fait que combattre la désinformation ne suffit pas. Il est essentiel d’améliorer la communication scientifique en la rendant plus accessible et plus claire pour le grand public. L’éducation aux médias et à l’esprit critique est une autre solution pour aider les individus à différencier les faits des fausses informations. Enfin, il est crucial d’agir sur les causes profondes, en réduisant les inégalités et en renforçant le sentiment d’appartenance sociale.
Conclusion : Une prise de conscience nécessaire

Les théories du complot et le rejet de la science ne sont pas seulement des phénomènes isolés : ils révèlent un malaise profond dans nos sociétés. Comprendre que la rancune et le sentiment d’exclusion jouent un rôle clé dans ces croyances permet d’adopter une approche plus efficace pour y remédier. Plutôt que de simplement corriger les fausses informations, il est essentiel de réduire les frustrations sociales et d’améliorer le dialogue entre les citoyens et les institutions. La clé réside dans une société plus inclusive, où chacun se sent écouté et valorisé.
Source étude : onlinelibrary