Le silence inquiétant de nos montagnes : les insectes disparaissent même loin de nous

Pour en avoir le cœur net, un chercheur américain, Keith Sockman, a passé près de vingt ans à observer un coin de montagne magnifique et isolé dans le Colorado. Un endroit sans usines, sans pesticides, sans villes à proximité… bref, un petit paradis terrestre. Il a patiemment compté les insectes volants, année après année, de 2004 à 2024. Il pensait, comme tout le monde, que là-bas au moins, tout irait bien. Malheureusement, ce qu’il a découvert est tout autre.

Les résultats de son travail sont pour le moins alarmants. En l’espace de deux décennies, le nombre d’insectes dans cette prairie de montagne a chuté de manière spectaculaire. Tenez-vous bien : la perte totale est estimée à 72,4%. C’est énorme. Pour se faire une idée, c’est comme si sur 4 insectes que vous croisiez il y a 20 ans, il n’en restait plus qu’un seul aujourd’hui. Chaque année, c’est une baisse moyenne de 6,6% qui s’ajoute. Une disparition lente, silencieuse, mais terriblement efficace.

Alors, si ce ne sont pas les activités humaines directes, qui est le responsable ? L’étude pointe un doigt accusateur vers un phénomène qui nous concerne tous : le changement climatique. Le professeur Sockman a trouvé un lien très fort entre la disparition des insectes et l’augmentation des températures en été. Les étés sont de plus en plus chauds, même en altitude, et il semblerait que les insectes ne le supportent tout simplement pas. C’est un peu comme si leur maison devenait progressivement un four, les empêchant de vivre et de se reproduire normalement.

On pourrait se dire « moins de moustiques, tant mieux ! ». Mais ce serait oublier que les insectes sont essentiels à la vie sur Terre. Ce sont eux, les petites mains de la nature. Ils pollinisent les fleurs qui donnent nos fruits et légumes, ils nettoient les sols en recyclant les déchets organiques et ils servent de nourriture à d’innombrables oiseaux, poissons et autres animaux. Sans eux, c’est tout l’équilibre de la nature qui s’effondre, un peu comme un château de cartes dont on retire les fondations.

Cette découverte est particulièrement inquiétante pour nos montagnes. Elles sont de véritables coffres-forts de biodiversité, abritant des espèces d’insectes et de plantes uniques au monde, qui se sont adaptées à des conditions très particulières. Si ces insectes disparaissent à cause du réchauffement, ils disparaissent pour de bon. C’est tout un patrimoine naturel d’une richesse inestimable qui risque de s’éteindre sous nos yeux.

Finalement, ce qui se passe dans cette montagne lointaine du Colorado est un message pour le monde entier. On pensait que la nature « sauvage » était un refuge imprenable, mais cette étude nous prouve le contraire. Le changement climatique ne connaît pas de frontières. Ce n’est pas une histoire pour faire peur, mais un appel à être plus attentifs. Le sort de ces petites bêtes est intimement lié au nôtre. Il est grand temps d’écouter ce que la nature, même dans ses plus grands silences, essaie de nous dire.