Après les carburants, les voitures électriques bientôt taxées ? Une idée controversée qui séduit de plus en plus de gouvernements
Auteur: Adam David
Pendant des années, rouler en électrique a rimé avec avantages fiscaux et conscience écologique. Cette époque pourrait bientôt être révolue en Suisse, où le gouvernement envisage très sérieusement de faire passer les conducteurs de véhicules à batterie à la caisse pour l’entretien des routes. Une petite révolution qui met fin à une exception et qui pourrait bien faire des émules.
Un trou dans les caisses de l'état
Le calcul est simple, presque implacable : plus il y a de voitures électriques sur les routes, moins les caisses de l’État encaissent de taxes sur les carburants. Or, ces revenus financent en grande partie la construction et l’entretien du réseau routier. Face à ce manque à gagner qui s’annonce, le Conseil fédéral suisse a décidé de prendre le taureau par les cornes et a ouvert une consultation publique sur le sujet.
L’objectif est clair : rétablir une forme d’équité entre tous les automobilistes. Pour l’instant, deux scénarios sont sur la table, et le débat promet d’être animé. Même le Touring Club Suisse, l’influent automobile-club du pays, soutient le principe, tout en prévenant qu’il surveillera de très près les modalités d’application.
Première option : la taxe au kilomètre
La première piste, baptisée « prestation kilométrique », est assez directe. L’idée est de faire payer les propriétaires de voitures électriques en fonction de la distance qu’ils parcourent sur le sol helvétique. Le système serait modulé : plus votre véhicule est lourd, plus la facture par kilomètre sera élevée. On parle d’un tarif moyen qui tournerait autour de 5,4 centimes par kilomètre pour une voiture de tourisme classique.
Cette approche a le mérite de la simplicité apparente, liant directement l’usure de la route à l’usage qui en est fait. Reste la question technique, et non des moindres, du suivi précis et fiable des kilomètres parcourus par chaque véhicule.
Seconde piste : taxer l'électricité à la source
L’autre option, peut-être plus complexe à mettre en œuvre, est celle du « courant de recharge ». Il s’agirait ici de prélever un impôt directement sur l’électricité consommée pour recharger les batteries. Le tarif envisagé est fixe, à 22,8 centimes par kilowattheure, quel que soit le type de véhicule.
La grande difficulté de cette variante est qu’elle devrait s’appliquer partout : sur les bornes publiques, bien sûr, mais aussi sur les installations privées, à domicile. Comment distinguer les électrons qui alimentent la voiture de ceux qui font tourner le lave-linge ? C’est tout le défi technique et logistique de cette proposition.
Un discours politique qui se veut rassurant
Derrière ces propositions, le message du gouvernement est celui de l’équité. « Le Conseil fédéral souhaite que tous les véhicules contribuent financièrement à l’infrastructure de transport, quel que soit leur mode de propulsion », peut-on lire dans le communiqué officiel. L’enjeu est de taille, puisqu’il faudra modifier la Constitution pour y parvenir.
Pour faire passer la pilule, le ministre en charge du dossier, Albert Rösti, se veut rassurant. Il assure que pour un automobiliste passant du thermique à l’électrique, l’impôt sera « équivalent », et la transition quasi transparente. Une logique qui ne convaincra sans doute pas les pionniers de l’électrique, qui voient s’envoler un avantage fiscal non négligeable dont ils profitaient jusqu’à présent.
la fin annoncée de l'eldorado fiscal
Au-delà des Alpes, le débat suisse est symptomatique d’une tendance de fond. À mesure que la voiture électrique se démocratise, la lune de miel avec les pouvoirs publics touche à sa fin. Les bonus à l’achat, les exemptions de péage ou les facilités de stationnement sont appelés à disparaître progressivement, un peu partout en Europe.
La question n’est plus de savoir *si* les conducteurs de voitures électriques participeront à l’effort collectif, mais plutôt *comment*. Le modèle suisse, avec ses deux approches distinctes, sera sans aucun doute observé de près bien au-delà de ses frontières. C’est tout l’équilibre économique de la transition énergétique automobile qui est en train de se redessiner.
Selon la source : automobile-magazine.fr