Antarctique : la découverte de fuites de méthane pourrait accélérer le réchauffement climatique
Auteur: Adam David
On la croyait préservée, lointaine, presque endormie sous sa carapace de glace. Mais l’Antarctique révèle une nouvelle facette, bien plus inquiétante : sous ses eaux, le méthane, un puissant gaz à effet de serre, s’échappe désormais en de multiples points. Ce qui n’était qu’une anomalie isolée prend des allures de phénomène.
Une découverte qui change la donne
Pour la communauté scientifique, c’est une véritable onde de choc. Une étude, publiée dans la revue Nature Communications, documente la découverte d’une quarantaine de nouvelles fuites de méthane dans la seule mer de Ross. Un chiffre qui change radicalement la donne. Car jusqu’ici, on ne connaissait qu’un seul suintement actif sur tout le continent blanc.
Cette multiplication soudaine suggère que les modèles climatiques actuels, déjà alarmants, pourraient avoir sous-estimé la contribution de l’Antarctique au réchauffement global. C’est une mauvaise surprise, et elle pourrait ne pas être la dernière.
Le méthane, cet ennemi invisible
Ce gaz n’a rien d’anodin. Le méthane est capable de piéger environ 80 fois plus de chaleur que le dioxyde de carbone sur une période de vingt ans. Il est stocké en quantités colossales dans des réservoirs sous-marins, formés au fil des millénaires. Lorsqu’il s’échappe, il remonte en chapelets de bulles vers la surface.
Mais combien atteint réellement l’atmosphère ? Une partie est-elle consommée par les microbes marins avant d’arriver à l’air libre ? C’est l’une des grandes inconnues qui angoisse les chercheurs, car la réponse conditionne l’impact réel de ces fuites sur notre climat.
Enquête dans les eaux glaciales
Pour tenter de percer le mystère, une équipe internationale a donc été dépêchée sur place. Dans les eaux glaciales de la mer de Ross, navires de recherche, robots téléguidés et plongeurs ont uni leurs forces. Leur mission : cartographier ces fuites et prélever des échantillons, parfois jusqu’à près de 240 mètres de profondeur.
C’est un travail de fourmi dans un environnement des plus hostiles. Chaque échantillon, chaque relevé acoustique est une pièce d’un puzzle qu’il faut assembler en urgence pour comprendre ce qui se joue sous nos pieds, à l’autre bout du monde.
L'angoisse des scientifiques
Et les résultats confirment leurs craintes. ‘Ce qui était considéré comme rare semble maintenant se répandre’, confie à CNN Sarah Seabrook, une scientifique marine qui a participé à l’étude. Elle parle d’une ‘angoisse’ à chaque nouvelle découverte.
Son confrère Andrew Thurber, professeur à l’Université de Californie, va plus loin. Il craint que l’Antarctique ne passe ‘d’un laboratoire naturel à un épicentre dangereux’ si la tendance se poursuit. Des mots forts, qui traduisent l’inquiétude grandissante de ceux qui sont en première ligne.
La menace d'un cercle vicieux
Si l’origine exacte de ces émanations reste encore floue, l’ombre du réchauffement climatique plane. Les chercheurs explorent une piste sérieuse : une ‘boucle de rétroaction’ infernale, similaire à ce que l’on observe déjà en Arctique. En clair, le réchauffement des océans pourrait fragiliser les fonds marins et libérer le méthane.
Ce gaz, une fois dans l’atmosphère, accélérerait à son tour le réchauffement global, qui à son tour libérerait encore plus de méthane. Un cercle vicieux dont il serait difficile, voire impossible, de s’extraire.
le temps presse
L’alerte est sonnée. Loin d’être un simple sujet d’étude pour spécialistes, ces fuites de méthane pourraient bien redéfinir les scénarios climatiques de demain. L’équipe de chercheurs s’apprête d’ailleurs à retourner sur place pour deux mois supplémentaires. Le temps presse pour comprendre l’ampleur du phénomène avant que la bombe à retardement ne soit complètement amorcée.
Selon la source : geo.fr