Trump veut se dédommager avec 230 millions de dollars de l’argent des contribuables
Auteur: Simon Kabbaj
C’est une situation sans précédent qui brouille toutes les lignes entre l’État et l’intérêt personnel. Donald Trump a confirmé qu’il demandait 230 millions de dollars de dommages et intérêts au ministère de la Justice pour les enquêtes menées contre lui par le passé. Le plus surprenant est que le président a admis lui-même le caractère surréaliste de la situation, déclarant qu’il s’agissait d’une ‘décision terriblement étrange’. ‘C’est moi qui prends la décision, et cette décision doit passer par mon bureau’, a-t-il affirmé, avant de concéder : ‘il est terriblement étrange de prendre une décision où je me paye moi-même‘.
Un ministère de la Justice aux ordres ?
Cette demande de 230 millions de dollars devrait rencontrer peu de résistance. En effet, le ministère de la Justice est désormais dirigé par des alliés loyaux de Trump. Le procureur général adjoint, Todd Blanche, n’est autre que l’ancien avocat personnel de Trump. Le chef de la division civile, Stanley Woodward Jr., a représenté plusieurs collaborateurs de l’ancien président. Pour couronner le tout, la procureure générale Pam Bondi a renvoyé le principal conseiller en éthique de l’agence en juillet. Dans ces conditions, l’approbation du paiement semble n’être qu’une formalité.
Pourquoi cette demande ? Les deux enquêtes qui fâchent
La demande de Trump vise à obtenir réparation pour deux enquêtes du FBI qu’il a toujours considérées comme des « chasses aux sorcières ». La première est l’enquête de 2016, nom de code « Crossfire Hurricane », sur l’ingérence de la Russie dans l’élection présidentielle et les liens possibles avec sa campagne. L’enquête avait conclu que la Russie s’était bien immiscée pour favoriser Trump, mais n’avait pas trouvé de preuves suffisantes d’une conspiration criminelle. La seconde plainte concerne la spectaculaire perquisition de sa résidence de Mar-a-Lago en août 2022, dans l’affaire des documents classifiés. ‘J’ai subi des dommages très importants’, a expliqué Trump, tout en promettant que ‘tout l’argent que je recevrais, je le donnerais à des œuvres de charité’.
L'affaire de Mar-a-Lago : un dossier classé sans suite
Pour rappel, la perquisition à Mar-a-Lago avait permis de retrouver des centaines de documents sensibles, y compris des dossiers top secrets, ce qui avait conduit à une enquête fédérale pour mauvaise manipulation de documents et entrave à la justice. En 2023, Donald Trump avait été inculpé de 40 chefs d’accusation. Mais l’affaire s’est effondrée en juillet 2024 lorsque la juge Aileen Cannon, nommée par Trump lui-même, a classé l’affaire sans suite, déclarant inconstitutionnelle la nomination du conseiller spécial Jack Smith. Au début de 2025, les charges restantes contre les assistants de Trump ont également été abandonnées.
Le lien surprenant avec la salle de bal à 250 millions de dollars
Cette demande de 230 millions de dollars intervient au moment même où Trump a lancé un autre projet controversé : la démolition d’une partie de l’aile Est de la Maison Blanche pour y construire une salle de bal à 250 millions de dollars. Évoquant l’ironie de la situation, Trump a lui-même fait le lien : ‘Ça fait un peu mauvais effet, je me fais un procès à moi-même, n’est-ce pas ?’. Alors qu’il avait initialement affirmé que la salle de bal serait financée par des ‘patriotes généreux’ et ‘votre serviteur’, il laisse maintenant entendre que l’argent du ministère de la Justice pourrait aider à financer son projet.
Conclusion : le contribuable, tirelire personnelle du président ?
En tant que président, Donald Trump ravive donc une plainte qui avait été rejetée en 2022, affirmant que les enquêtes lui ont causé d’importants préjudices personnels et politiques justifiant une compensation financière. Cette démarche, qualifiée de ‘choquante’ par de nombreux experts en éthique, soulève une question fondamentale : un président peut-il utiliser l’appareil d’État et l’argent des contribuables pour se dédommager de poursuites judiciaires, surtout quand la décision finale repose sur ses propres alliés qu’il a nommés à des postes clés ? La frontière entre l’intérêt de l’État et l’intérêt personnel de son dirigeant n’a jamais semblé aussi floue.
Selon la source : thehill.com