Des scientifiques définissent 5 profils de sommeil, et certains pourraient aider à repérer des maladies mentales
Auteur: Simon Kabbaj
On a tendance à classer les gens en deux catégories : les « bons dormeurs’ et les ‘mauvais dormeurs ». Mais la réalité est bien plus complexe. Une nouvelle étude scientifique vient de tout chambouler en identifiant cinq profils de sommeil distincts. Comme le rapporte une publication du 7 octobre dans la revue PLOS Biology, ces profils, qui ont chacun leur propre ‘signature’ dans le cerveau, ne dépendent pas seulement de la durée de nos nuits. Ils sont liés à nos émotions, à notre génétique et pourraient même servir de signaux d’alerte pour des maladies mentales comme la dépression ou l’anxiété.
Au-delà du "bien ou mal dormi" : une nouvelle approche
On sait que le manque de sommeil augmente le risque de dépression, de maladies cardiovasculaires et de troubles cognitifs. Mais jusqu’à présent, les études restaient assez vagues. Pour y voir plus clair, les chercheurs ont utilisé une approche révolutionnaire. Ils ont analysé les données du Human Connectome Project, une immense base de données qui cartographie les connexions du cerveau, sur 770 jeunes adultes en bonne santé. En utilisant une intelligence artificielle, ils ont croisé les scanners cérébraux, les habitudes de vie et les questionnaires sur le sommeil, sans catégories prédéfinies. L’objectif : laisser la machine trouver les véritables ‘familles’ de dormeurs.
Les cinq profils de sommeil révélés par l'étude
L’intelligence artificielle a ainsi fait émerger cinq grands profils de sommeil, bien plus nuancés que la simple opposition ‘bon/mauvais dormeur’ :
- Les ‘mauvais dormeurs’ : C’est le profil classique. Ils ont du mal à s’endormir et à rester endormis, et cela est fortement lié à des problèmes de santé mentale comme l’anxiété, la dépression ou le stress.
- Les ‘résilients au sommeil’ : C’est le profil le plus surprenant. Ces personnes présentent des difficultés d’attention et de concentration pendant la journée (parfois liées au TDAH), mais, étonnamment, elles ne se plaignent d’aucun problème de sommeil.
- Les ‘petits dormeurs’ : Ils dorment peu, mais leur principal problème est cognitif. Ils ont des difficultés de réflexion et de mémoire, et peuvent être plus sujets à l’agressivité.
- Les ‘utilisateurs d’aides au sommeil’ : Leur sommeil est principalement influencé par la prise de somnifères, qu’il s’agisse de médicaments, de CBD ou de simples tisanes à la camomille.
- Les ‘dormeurs perturbés’ : Leur sommeil est souvent interrompu, possiblement à cause de la consommation d’alcool, de cigarettes, ou simplement de la déshydratation, ce qui affecte leur santé et leur vie quotidienne.
Une "signature neuronale" unique pour chaque profil
Ce qui rend cette découverte encore plus solide, c’est que les chercheurs ont découvert que chaque profil de sommeil est lié à une « signature neuronale » spécifique, une activité cérébrale distincte visible sur les scanners. Cela suggère que ces profils ne sont pas juste une question de ressenti personnel, mais qu’ils correspondent à de véritables différences biologiques dans le fonctionnement de notre cerveau. ‘J’espère vraiment que les cliniciens prendront en compte qu’il y a plus à explorer dans le sommeil lors de leur première évaluation’, a déclaré l’auteure principale de l’étude, Aurore Perrault.
Pourquoi cette découverte est-elle si importante pour l'avenir ?
Cette nouvelle classification pourrait révolutionner la prise en charge des troubles du sommeil et de la santé mentale. Les chercheurs pensent que ces cinq profils pourraient être utilisés comme des ‘biomarqueurs‘, des signaux d’alerte précoces pour des maladies qui pourraient se développer plus tard, comme la dépression ou l’anxiété. En identifiant le profil de sommeil d’une personne jeune et en bonne santé, on pourrait peut-être anticiper ses futures vulnérabilités.
Vers des traitements personnalisés pour le sommeil
Surtout, cette découverte ouvre la voie à des traitements beaucoup plus personnalisés. Au lieu de proposer la même solution à tous ceux qui « dorment mal », les médecins pourraient adapter le traitement au profil spécifique du patient. Par exemple, une thérapie comportementale pourrait être plus efficace pour un « mauvais dormeur« , tandis qu’une application de suivi du sommeil pourrait mieux aider un « petit dormeur« . Cela pourrait aussi expliquer pourquoi environ 40% des patients ne répondent pas aux thérapies classiques contre l’insomnie : peut-être que le traitement n’est tout simplement pas adapté à leur profil.
Conclusion : poser les bonnes questions sur notre sommeil
Au final, cette étude du Dr. Henry Yaggi est un appel à considérer notre sommeil avec plus de nuance. ‘Comment dormez-vous ?’ n’est plus une question à laquelle on peut répondre par « bien » ou « mal ». C’est une porte d’entrée vers une compréhension plus fine de notre santé mentale et physique. Pour les médecins, comme pour nous-mêmes, il est temps d’aller au-delà de la simple durée de nos nuits et de commencer à poser plus de questions. C’est le début d’une nouvelle ère de la médecine du sommeil, plus personnalisée et plus préventive.
Disclaimer : Cet article est à visée informative et ne remplace pas l’avis d’un professionnel de santé. Les informations présentées proviennent de sources scientifiques, mais elles ne constituent pas un diagnostic ni un conseil médical. En cas de troubles du sommeil persistants, il est recommandé de consulter un médecin ou un spécialiste du sommeil.
Selon la source : sleepfoundation.org