L’ADN du requin : l’arme biologique ultime contre le cancer, selon des scientifiques
Auteur: Mathieu Gagnon
L’ennemi inattendu du cancer

Pourquoi, me demanderez-vous? La réponse se cache dans leur ADN, ou plus précisément, dans la manière tout à fait unique dont leur corps se défend. Des recherches fascinantes, menées notamment dans un laboratoire discret à l’Université du Wisconsin Madison, suggèrent que les anticorps présents chez les requins pourraient être le futur de l’oncologie. C’est une affirmation audacieuse, bien sûr, mais les preuves s’accumulent. Aaron LeBeau, un chercheur spécialisé dans le cancer qui dirige ce labo, le formule sans détour : « Nous exploitons la puissance du système immunitaire du requin pour combattre le cancer humain. »
Le secret ancestral de l’immunité

Et ce qui est étrange, c’est que ce système est relativement simple. Il est constitué d’anticorps en « chaîne unique », petits et très, très collants. Nous, et la plupart des autres mammifères, avons des anticorps en double chaîne, qui sont plus grands et plus complexes. Bien que la simple chaîne du requin prenne un peu plus de temps à générer une réponse immunitaire, c’est sa taille minuscule, son côté simple et surtout son incroyable capacité d’adhérence qui la rend si spéciale. C’est là toute la différence, je suppose.
Le « contorsionniste moléculaire » : comment ça marche ?

Une fois qu’un anticorps de requin s’accroche à la protéine cancéreuse, eh bien, il ne lâche jamais prise. Il cible les cellules malades comme un missile à tête chercheuse. Et le plus génial dans tout ça, c’est que les cellules cancéreuses finissent toujours par muter pour résister à la chimiothérapie traditionnelle. Mais ces petits anticorps souples de requin, eux, peuvent atteindre des zones de la protéine qui ne mutent pas. C’est une faiblesse que le cancer ne peut pas corriger !
L’élevage des anticorps : la méthode du laboratoire
La méthode est simple, très similaire à la façon dont on développe un vaccin chez l’humain. Ils injectent aux requins des protéines issues des cancers qu’ils souhaitent cibler (par exemple, le cancer du sein ou de la prostate). Une fois que le requin a monté une réponse immunitaire, ils prélèvent juste une petite quantité de sang. Ensuite, « grâce à la magie de la biologie moléculaire », comme dit LeBeau, ils isolent cet anticorps spécifique au cancer. C’est vraiment de la haute technologie mise au service de la nature, je trouve ça impressionnant.
Des résultats spectaculaires chez la souris

Résultat? En observant les souris sous TEP scan (une technique d’imagerie), les chercheurs ont vu les anticorps filer directement vers les tumeurs. Pas d’erreur, pas d’hésitation. La deuxième phase a consisté à attacher cette fois de très hauts niveaux de radiation aux anticorps. Et là, l’effet a été radical. Les anticorps se sont agrippés aux tumeurs et les ont, pour citer LeBeau, « anéanties ».
Imaginez la puissance : cibler avec une précision incroyable une zone que la chimiothérapie ne peut pas atteindre, et la détruire complètement. C’est un changement de paradigme.
La sécurité avant tout : l’étape des primates

Récemment, le laboratoire a injecté les anticorps chez des macaques, un type de singe. Ces singes n’avaient pas de tumeurs. Les scanners ont montré que leur corps parvenait à éliminer les anticorps de leurs systèmes après leur mission. Cela signifie que les anticorps, même chargés de substances toxiques ou de radiation, ne risquent pas de s’égarer loin de leur cible. Une excellente nouvelle pour la sécurité future des traitements chez l’humain.
Un avenir plus vaste que le cancer

Ils pourraient être conçus pour cibler très précisément les protéines actives dans la sensation de douleur. Ceci aiderait alors les médecins à localiser la source du mal, plutôt que de simplement traiter les symptômes avec des antidouleurs classiques. Imaginez un peu, une méthode pour enfin identifier d’où vient cette satanée douleur qui ne part jamais ! C’est une piste que je trouve extrêmement prometteuse pour améliorer le quotidien de tant de gens.
Un espoir qui nage vers nous

La prochaine étape, cruciale, sera de transformer ces anticorps en qualité pharmaceutique pour étudier leur comportement chez l’humain. Si tout va bien, les premiers tests spécifiques pourraient avoir lieu d’ici un ou deux ans. C’est rapide, très rapide, compte tenu de la complexité de la recherche médicale. Il est donc permis d’espérer que, très bientôt, le secret de la survie millénaire du requin devienne notre propre bouclier contre la maladie.