Ces rares chiens au nez fourchu pourraient aider à résoudre un mystère génétique chez l’humain

Le Catalburun est un chien extrêmement rare, élevé depuis des générations dans quelques régions reculées de Turquie. À cause de cette reproduction en vase clos, le patrimoine génétique de la race est très peu varié. C’est une aubaine pour les chercheurs : dans cette uniformité, les mutations se repèrent plus facilement, et certaines pourraient bien détenir des clés pour la médecine humaine.

Une équipe de scientifiques internationaux, incluant le National Institutes of Health (États-Unis) et le KTH Royal Institute of Technology (Suède), a analysé l’ADN de 2 000 chiens. Leur but : comprendre l’impact de certains gènes sur la forme du visage des chiens. Plusieurs variantes génétiques ont été identifiées, et l’une d’elles, découverte chez le Turkish Pointer, aurait un lien direct avec son nez fendu.

Les chercheurs ont mis en lumière une mutation spécifique du gène PDFGRA, un gène essentiel au développement du visage pendant la grossesse. Chez le Turkish Pointer, cette mutation expliquerait pourquoi le museau se divise en deux, au lieu de fusionner comme chez les autres races. Un détail qui pourrait paraître anodin… mais qui résonne de façon surprenante avec un trouble humain bien connu.

C’est à ce moment-là que la découverte devient vraiment étonnante. Les chercheurs pensent que la même anomalie génétique trouvée chez le chien au nez fendu pourrait aussi jouer un rôle dans une malformation chez certains bébés humains : la fente labiale ou palatine. Il s’agit d’une ouverture au niveau de la lèvre ou du palais, qui apparaît pendant la grossesse, quand les deux moitiés du visage ne se rejoignent pas complètement. Cette malformation touche 1 bébé sur 700, et peut rendre l’alimentation, la parole et même l’audition plus difficiles. Grâce à la découverte de ce gène chez le chien, les scientifiques espèrent mieux comprendre comment cette malformation apparaît, et peut-être un jour, mieux la prévenir ou la traiter.

Les races de chiens très consanguines, comme le Turkish Pointer, deviennent de véritables laboratoires vivants pour les chercheurs. Contrairement aux humains, dont la diversité génétique rend les études complexes, ces chiens permettent d’isoler plus facilement les mutations à l’origine de certaines maladies ou malformations. Ainsi, grâce à ce nez fendu si singulier, la science fait un pas de plus vers la compréhension d’un mystère médical chez l’humain.

Ce n’est pas tous les jours qu’un chien rare et peu connu devient un acteur clé de la recherche médicale. Pourtant, le Turkish Pointer le prouve : les secrets de la nature animale peuvent éclairer ceux de notre propre biologie. Grâce à cette découverte, les chercheurs espèrent un jour prévenir certaines malformations dès les premiers stades de la grossesse. Et tout cela, grâce à un museau fendu qui, hier encore, n’était qu’une curiosité.

Source étude : genome.cshlp.org