Une expédition au cœur des glaces de l’Antarctique pour percer les secrets du climat
Auteur: Mathieu Gagnon
Un duo de choc face au désert blanc

Imaginez un instant. Trois mois, seuls au monde, au cœur du continent le plus hostile de la planète. C’est le pari un peu fou que se sont lancé Heidi Sevestre, une glaciologue française de renommée mondiale, et Matthieu Tordeur, un explorateur aguerri. Leur mission ? Traverser une partie de l’Antarctique en kite-ski, ces drôles de skis tirés par une voile.
Mais ce n’est pas juste une aventure pour le plaisir. Non, leur quête est bien plus importante : ils partent à la recherche de glace très, très ancienne, vieille de 130 000 ans. Un véritable voyage dans le temps pour mieux comprendre le futur de notre planète. C’est une expédition pionnière, qui mêle l’aventure pure à une science vraiment ambitieuse, comme le dit si bien Heidi.
À la recherche de la glace perdue

Pourquoi chercher de la glace aussi vieille ? C’est une excellente question. Cette glace est un trésor, une archive de notre climat. Elle date d’une époque, il y a 130 000 ans, où la Terre était environ trois degrés plus chaude qu’aujourd’hui. Tiens, ça nous rappelle quelque chose, n’est-ce pas ? C’est à peu près la température que nous pourrions atteindre à la fin de ce siècle si rien ne change.
L’idée est simple, mais géniale. En analysant ces couches de glace, les scientifiques peuvent savoir si une partie de l’Antarctique avait fondu à cette époque. Si, à un endroit, ils ne trouvent pas de glace plus vieille que 130 000 ans, cela signifierait que tout a fondu et disparu lorsque le climat s’est réchauffé. Une information cruciale pour prévoir ce qui nous attend.
Un défi logistique et humain hors norme

Ce n’est pas une promenade de santé, loin de là. Le duo doit parcourir 4 000 kilomètres en 90 jours. Une course contre la montre, car fin janvier, il n’y a plus d’avions pour venir les chercher. Ils seront en autonomie complète, tirant chacun un traîneau rempli de tout le nécessaire : nourriture, matériel, et même deux radars pour sonder la glace sous leurs pieds.
Le froid sera leur principal ennemi, avec des températures pouvant chuter jusqu’à -50 degrés Celsius. Tout est calculé au gramme près. Pour vous donner une idée, le petit-déjeuner, c’est 70g de flocons d’avoine, 30g de muesli et 14g de raisins secs. Pas un de plus. C’est ça, la vie en expédition.
Le ‘continent de tous les extrêmes’

Matthieu Tordeur connaît bien ces régions polaires. Il décrit l’Antarctique comme le continent de tous les extrêmes. C’est l’endroit le plus froid, le plus sec et le plus venteux de la planète. Et comme si ça ne suffisait pas, c’est aussi le plus élevé, avec une altitude moyenne qui les fera évoluer jusqu’à 3 800 mètres. On a du mal à se l’imaginer.
Là-bas, pas de pingouins ni de phoques, ils sont tous sur les côtes. À l’intérieur des terres, il n’y a rien. Juste une immense, une infinie étendue de blancheur. Pas de vie, ni animale, ni humaine. Le silence absolu. Il faut un mental d’acier pour affronter ça.
Quel est l’enjeu pour nous tous ?

Au fond, cette expédition nous concerne tous. Car si l’Antarctique de l’Ouest venait à s’effondrer, les conséquences seraient désastreuses. Cette partie du continent contient assez de glace pour faire monter le niveau des mers de quatre, cinq, voire six mètres. Vous imaginez ?
Heidi Sevestre le dit sans détour : si cela se produit, ce sont des centaines de millions de personnes qui devront quitter leur maison. Ce n’est pas un film de science-fiction, c’est une possibilité réelle que leur mission cherche à mieux évaluer pour nous alerter.
Conclusion : Un message pour le monde

Leur voyage, soutenu par l’UNESCO, n’est pas un hasard de calendrier. Il se déroule en même temps que la grande conférence sur le climat, la COP30, au Brésil. Le message est clair : ils veulent que leur aventure et leurs découvertes parlent aux dirigeants du monde entier.
Mais Heidi Sevestre nous laisse sur une note d’espoir. Elle est convaincue qu’il n’est pas trop tard pour éviter le pire. « Nous savons ce que nous devons faire pour préserver ces masses de glace : nous devons décarboner et utiliser moins de combustibles fossiles. » Un message simple, porté par deux personnes extraordinaires depuis le bout du monde. Espérons qu’il sera entendu.