
Et si notre façon de parler pouvait en dire long sur notre santé cognitive ? Des chercheurs ont récemment découvert un indice subtil mais révélateur qui pourrait permettre de détecter les premiers signes de déclin cérébral avant même l’apparition des symptômes visibles de maladies comme Alzheimer.
Grâce à une approche innovante, cette étude met en lumière un aspect du langage souvent ignoré, qui pourrait devenir un outil clé pour surveiller l’évolution des capacités cognitives avec l’âge. Quels sont ces signaux ? Comment peuvent-ils nous alerter sur notre état de santé ?
1. Pourquoi surveiller la façon dont on parle ?

Avec l’âge, le cerveau ralentit naturellement. On oublie parfois un mot, on cherche nos clés, ou on a du mal à retrouver le nom d’une personne. Si ces oublis occasionnels sont normaux, une difficulté fréquente à parler avec fluidité pourrait signaler un problème plus profond. La vitesse d’élocution, les pauses fréquentes et la diversité des mots utilisés pourraient être des indices d’un déclin cognitif en cours.
Jusqu’à présent, les spécialistes pensaient que la principale alerte devait être la difficulté à retrouver ses mots. Mais les nouvelles recherches indiquent que c’est plutôt la vitesse à laquelle on parle qui pourrait être un meilleur indicateur du vieillissement cérébral.
2. Une étude qui change notre compréhension du langage et du cerveau

Les chercheurs de l’Université de Toronto ont mené une expérience sur 125 adultes âgés de 18 à 90 ans. Les participants ont été invités à décrire une scène en détail, pendant que leur discours était enregistré et analysé par une intelligence artificielle.
L’IA a observé plusieurs aspects :
- La rapidité de la parole
- Le temps de pause entre les mots
- La variété du vocabulaire employé
En parallèle, ces personnes ont passé des tests mesurant leur capacité à se concentrer, à réfléchir rapidement et à organiser leurs idées. Les résultats ont montré que le ralentissement de la parole était étroitement lié au déclin des capacités cognitives, même chez des personnes n’ayant pas encore de signes évidents d’Alzheimer.
3. Un test innovant pour mieux comprendre ces difficultés

Pour mieux comprendre comment le cerveau traite les mots, les chercheurs ont mené un test simple. Ils montraient aux participants des images d’objets du quotidien, comme un balai, tout en leur faisant écouter un mot en même temps.
Ce mot pouvait être :
- Un mot lié à l’image (par exemple, “serpillère” en voyant un balai), ce qui pouvait semer la confusion.
- Un mot qui ressemble dans les sons (par exemple, “balade” en voyant un balai), ce qui pouvait au contraire aider à retrouver le bon mot.
Les résultats ont montré que les personnes qui parlaient plus lentement avaient aussi plus de mal à nommer rapidement les objets. Cela signifie que le ralentissement du langage pourrait être un signe d’un déclin des capacités du cerveau, affectant non seulement la mémoire, mais aussi la rapidité de réflexion et la fluidité du discours.
4. Un lien entre la parole et les troubles neurologiques

Le lien entre la parole et le cerveau est complexe. Ce qui est particulièrement important ici, c’est que le ralentissement du débit verbal ne concerne pas uniquement la mémoire, mais également la manière dont le cerveau traite et organise l’information.
Les chercheurs ont aussi observé que les participants ayant un ralentissement du langage montraient des signes de diminution de la capacité à planifier et à exécuter des tâches. Cela signifie que le déclin cognitif ne se limite pas à la mémoire, mais affecte aussi la prise de décision et la gestion quotidienne.
5. Mieux tester les capacités cognitives grâce aux mots

Si l’étude menée à Toronto a apporté des informations cruciales, les chercheurs estiment qu’un autre type de test pourrait encore mieux détecter les premiers signes d’Alzheimer : les tests de fluidité verbale.
Ces tests consistent à demander aux participants de nommer autant de mots que possible dans une catégorie donnée (ex. “nommez le plus d’animaux possible en une minute”).
Pourquoi ce test est intéressant ?
- Il évalue la mémoire et la rapidité de réflexion, sans se limiter à un mot précis.
- Il engage plusieurs zones du cerveau impliquées dans le langage, la mémoire et l’organisation.
- Une baisse de performance peut indiquer un début de maladie neurodégénérative.
En combinant ces tests avec l’analyse du débit de parole, il serait possible d’identifier plus tôt les personnes à risque de développer une maladie comme Alzheimer.
6. Des outils modernes pour une détection précoce

Aujourd’hui, les avancées technologiques permettent d’analyser le langage naturel avec des outils d’intelligence artificielle. Déjà, des études passées avaient remarqué des changements subtils dans la façon de parler de personnalités publiques comme Ronald Reagan et Iris Murdoch avant leur diagnostic de démence.
Ce qui change aujourd’hui, c’est qu’au lieu d’analyser ces changements après coup, on peut maintenant les détecter de manière précoce et automatique, grâce à l’IA.
L’analyse du débit de parole pourrait ainsi devenir un outil accessible et non-invasif pour repérer les premiers signes de déclin cognitif, bien avant que des troubles graves n’apparaissent.
7. Que faire si l’on remarque un ralentissement du langage ?

Il est normal que la parole ralentisse légèrement avec l’âge, mais si vous remarquez que vous :
- Cherchez souvent vos mots
- Faites plus de pauses en parlant
- Avez l’impression de perdre le fil d’une conversation
Il pourrait être utile de consulter un médecin pour évaluer votre santé cognitive.
De plus, il existe des moyens de préserver la fluidité du langage et la mémoire :
- Lire et écrire régulièrement
- Faire des jeux de mots et des puzzles cognitifs
- Maintenir des conversations fréquentes et stimulantes
- Apprendre une nouvelle langue ou pratiquer un hobby impliquant le langage
Ces activités aident à stimuler le cerveau et peuvent ralentir le déclin cognitif.
Conclusion

Grâce aux avancées scientifiques, nous comprenons mieux aujourd’hui que le ralentissement du langage pourrait être un indicateur précoce des maladies neurodégénératives comme Alzheimer. L’étude de l’Université de Toronto a mis en lumière un élément essentiel : ce n’est pas seulement l’oubli des mots qui importe, mais aussi la vitesse à laquelle nous les prononçons.
Avec l’aide de l’intelligence artificielle et des nouveaux tests de fluidité verbale, il pourrait bientôt être possible de détecter ces changements bien plus tôt, offrant ainsi aux patients une chance d’adopter des stratégies pour ralentir la progression de la maladie.
Avez-vous déjà remarqué un changement dans votre façon de parler ou celle d’un proche ?
Source : theconversation