Une IA découvre enfin ce qui pourrait déclencher Alzheimer – et un traitement potentiel pour l’arrêter
Auteur: Simon Kabbaj
Depuis des décennies, Alzheimer demeure une énigme douloureuse. Elle efface les souvenirs, bouleverse les familles et laisse la science souvent démunie. Malgré les efforts, les traitements restent rares et peu efficaces. Mais une nouvelle recherche américaine relance l’espoir. Grâce à l’intelligence artificielle, des chercheurs pensent avoir mis la main sur un possible déclencheur de la maladie, et surtout, sur une molécule capable de l’arrêter.
L’intelligence artificielle, alliée inattendue de la médecine

L’IA ne sert pas qu’à écrire des poèmes ou créer des images. Elle peut aussi plonger dans l’infiniment complexe de notre biologie. À l’Université de Californie à San Diego (UC San Diego), une équipe de chercheurs l’a utilisée pour modéliser des structures invisibles à l’œil nu, dans le but de comprendre un enzyme lié à Alzheimer. C’est cette technologie de pointe qui a permis une avancée cruciale.
Un gène coupable

Les scientifiques se sont penchés sur un enzyme appelé PHGDH, et sur le gène qui le produit. Jusqu’ici, ce gène était simplement reconnu comme un indicateur d’Alzheimer, surtout chez les patients dont la maladie évolue rapidement. Mais une question les hantait : ce gène pourrait-il être plus qu’un simple témoin ? Pourrait-il être l’un des coupables ?
Un interrupteur caché dans l’enzyme

Pour mieux comprendre ce que faisait vraiment ce gène, les chercheurs ont demandé à l’intelligence artificielle de reconstruire en trois dimensions la forme exacte de l’enzyme PHGDH. En observant cette structure très détaillée, ils ont découvert quelque chose d’inattendu : cet enzyme ne se contentait pas de faire son travail habituel, il avait aussi la capacité d’allumer ou d’éteindre certains autres gènes. Comme un interrupteur caché, il modifiait le fonctionnement de cellules importantes dans le cerveau. Une fonction inconnue jusqu’à présent, qui pourrait avoir de lourdes conséquences.
Astrocytes : les cellules oubliées

Ce mécanisme caché semble affecter deux gènes spécifiques à l’intérieur des astrocytes – des cellules cérébrales longtemps sous-estimées. Pourtant, elles jouent un rôle clé : elles gèrent l’inflammation et nettoient les déchets du cerveau. Si ces fonctions sont perturbées, le cerveau devient vulnérable. Le lien avec Alzheimer devient alors évident.
Une réaction en chaîne redoutable

Quand PHGDH se dérègle, il empêche les astrocytes de faire leur travail. Résultat : les déchets s’accumulent, l’inflammation s’aggrave, et le cerveau entre dans une spirale de dégradation. Pour les chercheurs, c’est un point de bascule potentiel dans le déclenchement d’Alzheimer. Une hypothèse renforcée par leurs tests biologiques.
Une molécule prometteuse entre en scène

Les chercheurs ne se sont pas arrêtés à la découverte du problème. Ils ont voulu trouver un moyen de bloquer uniquement la partie nuisible de l’enzyme PHGDH, sans l’empêcher de faire son travail normal. Pour cela, ils ont de nouveau utilisé l’intelligence artificielle pour examiner la structure de l’enzyme de très près. Grâce à cela, ils ont trouvé une molécule appelée NCT-503. Cette molécule se fixe à un endroit bien précis de PHGDH, et l’empêche de dérégler les gènes dans le cerveau, un peu comme si elle neutralisait un faux chef d’orchestre avant qu’il ne crée le chaos.
Des résultats prometteurs sur les souris

Pour vérifier l’effet de NCT-503, les chercheurs ont mené des tests sur des souris atteintes d’un modèle d’Alzheimer. Résultat : les animaux ont montré une amélioration significative de leur mémoire et une réduction des signes d’anxiété. C’est une avancée précieuse, même si l’homme reste une étape à franchir.
Un médicament… mais pas pour tout de suite

Même si les résultats donnent de l’espoir, il ne faut pas s’emballer trop vite. Avant de pouvoir proposer un vrai traitement aux patients, il faudra encore beaucoup de temps. Des tests rigoureux sur des humains devront être réalisés, sur plusieurs années, pour vérifier que la molécule est efficace, sans danger, et bien tolérée à long terme. Mais malgré ce long chemin à parcourir, cette découverte représente un vrai tournant dans la recherche contre Alzheimer.
Un détail qui change tout : la barrière du cerveau

Autre bonne nouvelle : NCT-503 peut franchir la barrière hémato-encéphalique, une frontière naturelle qui empêche la majorité des médicaments d’atteindre le cerveau. Cette capacité rend la molécule particulièrement intéressante, car elle pourrait être prise par voie orale tout en atteignant efficacement les neurones.
Vers une nouvelle classe de traitements ?

Selon les chercheurs, cette découverte ouvre la porte à une toute nouvelle famille de molécules thérapeutiques. Grâce à l’IA, il sera désormais possible d’identifier d’autres enzymes aux rôles cachés, et de concevoir des médicaments sur mesure, ciblant uniquement les mauvaises fonctions.
Conclusion – Un pas de plus vers l’espoir

Alzheimer reste une montagne difficile à gravir. Mais chaque avancée compte, surtout quand elle permet de mieux comprendre ce qui se passe dans le cerveau. Grâce à l’intelligence artificielle et à la persévérance des chercheurs, nous sommes peut-être en train d’écrire le début d’un nouveau chapitre contre cette maladie. Un chapitre où espoir, science et technologie marchent main dans la main.
Source : Cell