
Depuis plusieurs années, les éléphants étaient considérés comme des animaux presque immunisés contre le cancer, une croyance qui a alimenté de nombreux espoirs chez les chercheurs. Cette idée, largement répandue, a laissé croire que les secrets de leur résistance pouvaient aider les humains à mieux lutter contre cette maladie. Mais une récente étude vient bouleverser cette image idyllique. En réalité, les éléphants, tout comme d’autres grands animaux, sont bel et bien touchés par le cancer, parfois plus que ce que leur taille laissait imaginer. Explications.
1. Pourquoi la taille influence le risque de cancer

De manière générale, plus un animal est grand, plus il possède de cellules, et chaque cellule peut potentiellement devenir cancéreuse. À chaque fois qu’une cellule se divise, il existe un risque qu’une erreur apparaisse dans son ADN, ce qui peut conduire à une tumeur. Les grands animaux vivent aussi souvent plus longtemps, ce qui multiplie encore les occasions pour ces erreurs de survenir. Pourtant, pendant des décennies, les scientifiques ont observé que les grands animaux ne développaient pas systématiquement plus de cancers que les petits, un phénomène appelé le paradoxe de Peto, du nom du chercheur qui l’a décrit il y a presque 50 ans.
2. Une croyance populaire qui repose sur des idées fausses

L’idée selon laquelle les éléphants seraient presque immunisés contre le cancer est devenue populaire, non seulement auprès du grand public mais aussi chez certains scientifiques. Ce mythe s’est renforcé avec le temps, créant l’image d’un animal quasi invincible face aux tumeurs. Or, cette image est fausse. Une équipe de chercheurs de l’Université de Reading, au Royaume-Uni, a récemment comparé les taux de cancer de 263 espèces animales, y compris des mammifères géants comme les éléphants et les girafes. Leur constat est clair : les grands animaux, y compris les éléphants, développent bel et bien plus de cancers que les petits.
3. Ce que la science a réellement découvert

En utilisant des données provenant d’une étude précédente, les chercheurs ont refait toutes les analyses de manière indépendante. Ils ont confirmé que les grands animaux présentent effectivement un risque de cancer plus élevé, proportionnel à leur nombre de cellules. Les éléphants, par exemple, ont un taux de cancer supérieur aux petits mammifères, mais inférieur à ce qu’on pourrait attendre pour un animal de cette taille. Autrement dit, ils ne sont pas miraculeusement protégés, mais ils disposent de mécanismes de défense particuliers qui limitent les dégâts.
4. Les défenses naturelles des éléphants

Même s’ils sont touchés par le cancer, les éléphants possèdent certaines armes biologiques impressionnantes. Ils possèdent environ 20 copies d’un gène appelé TP53, connu pour son rôle dans la suppression des tumeurs, alors que les humains n’en ont qu’une seule. Ce gène agit comme un gardien, surveillant les cellules et déclenchant leur destruction en cas de problème. C’est grâce à ce type de mécanisme que les éléphants parviennent à limiter la prolifération des cancers, malgré leur taille imposante et leur longévité.
5. Apprendre des animaux pour mieux soigner les humains

Les scientifiques s’intéressent de plus en plus aux espèces qui présentent une résistance naturelle au cancer, dans l’espoir de découvrir de nouvelles pistes de traitement pour les humains. Certains animaux, comme une espèce de chauve-souris appelée la chauve-souris de Rickett, ont modifié plusieurs de leurs gènes pour éviter l’apparition de tumeurs. En comprenant ces mécanismes naturels, la recherche espère mettre au point des thérapies innovantes, inspirées de ce que la nature a déjà inventé.
6. Chaque espèce face au cancer : des destins inégaux

Si certaines espèces, comme les éléphants, développent des stratégies pour limiter les cancers, d’autres, comme les perruches ondulées, sont malheureusement beaucoup plus vulnérables que leur petite taille ne le laisse penser. Ces petits oiseaux développent 40 fois plus de cancers que ce qu’on attendrait. À l’inverse, les rats-taupes nus, longtemps considérés comme totalement immunisés, ne sont pas totalement à l’abri, même si leur taux reste exceptionnellement bas. Ces différences entre espèces aident les chercheurs à identifier les mécanismes les plus efficaces, et à imaginer comment les reproduire chez l’humain.
Conclusion

En résumé, les éléphants ne sont pas les géants invincibles face au cancer qu’on a longtemps imaginés, mais ils disposent de précieuses défenses naturelles, fruits d’une évolution rapide. En étudiant ces mécanismes, la science espère non seulement mieux comprendre la maladie, mais aussi trouver de nouveaux moyens de protéger la santé humaine. Cette recherche nous rappelle une leçon essentielle : dans la nature, chaque espèce a son histoire face au cancer, et certaines de ces histoires pourraient bien changer la nôtre.