Pourquoi de plus en plus de gens choisissent de ne pas avoir d’enfants – est-ce un problème ?
Auteur: Simon Kabbaj
Autrefois, avoir des enfants allait de soi. Aujourd’hui, pour une part croissante de la population, c’est un choix qu’on refuse délibérément. Ce n’est ni une question d’âge, ni une question de santé, mais une volonté personnelle de ne pas devenir parent. Cette décision soulève une question cruciale : vivre sans enfants, est-ce un problème pour la société ? Une récente étude américaine éclaire cette transformation sociale qui redéfinit la notion de famille, et oblige à regarder la parentalité sous un nouveau jour.
1. Un rejet assumé de la parentalité

Une étude menée par l’Université d’État du Michigan a révélé une hausse marquante du nombre d’adultes qui ne veulent pas d’enfants. En 2002, seulement 14 % des personnes sans enfants affirmaient ne pas vouloir en avoir du tout. Mais en 2023, ce chiffre est monté à 29 % – soit plus du double en seulement deux décennies. En parallèle, la proportion de non-parents qui déclaraient vouloir des enfants un jour a chuté, passant de 79 % en 2002 à 59 % en 2023.
Autrement dit, les personnes qui renoncent volontairement à la parentalité sont de plus en plus nombreuses, tandis que celles qui espèrent encore avoir des enfants sont de moins en moins nombreuses.
2. Enfants ? Trop de soucis, pas assez d’envies

La parentalité est souvent associée à du bruit, des dépenses élevées, des nuits blanches, et des responsabilités sans fin. Et ces réalités pèsent lourd dans la décision de ne pas avoir d’enfants. Beaucoup considèrent les enfants comme une source de stress, de dépenses importantes, et même de maladies fréquentes. Dans ce contexte, le refus d’en avoir devient une forme de protection personnelle. À ces aspects pratiques s’ajoute une peur du futur : état du monde, crise climatique, instabilité économique, autant d’arguments avancés dans les sondages récents.
3. Le poids du passé et des préférences personnelles

Pour d’autres, la décision est liée à un parcours de vie douloureux ou un désintérêt profond. Certains évoquent de mauvaises expériences dans leur propre enfance, d’autres ne se sentent tout simplement pas attirés par les enfants. Et pour beaucoup, la vie s’est imposée autrement : jamais rencontré la bonne personne, autres priorités, ou tout simplement « ça ne s’est jamais fait », comme l’ont déclaré deux répondants sur cinq de plus de 50 ans.
4. Le facteur décisif : “je n’en ai pas envie”

Mais le détail le plus frappant de l’étude, c’est que la majorité des adultes sans enfants n’en veulent pas… parce qu’ils n’en ont jamais eu envie. En chiffres, 57 % des 18-49 ans l’ont affirmé, tout comme 31 % des plus de 50 ans. Ce n’est pas une absence de fertilité, ce n’est pas une tragédie : c’est un refus clair, affirmé et volontaire. Selon le professeur Zachary Neal, co-auteur de l’étude, la majorité de ces adultes sont “childfree” (sans enfants par choix) et non “childless” (sans enfants malgré eux).
5. Une société encore mal préparée

Ce changement de cap personnel entraîne des défis sociaux. Les services de santé et les institutions financières supposent encore trop souvent la présence d’enfants dans les parcours de vie. Les adultes qui n’en veulent pas ont besoin de contraception à long terme, de solutions de retraite qui ne reposent pas sur des héritiers, et de conseils adaptés à leur réalité. Or, aujourd’hui, ces besoins sont rarement pris en compte, laissant une partie croissante de la population mal servie, voire ignorée.
6. Des politiques publiques à repenser

Pour les gouvernements inquiets de la baisse des naissances, le défi est de taille. Ils ne peuvent plus se contenter d’encourager les naissances avec des allocations. Il faut comprendre que certains citoyens ne veulent tout simplement pas d’enfants. Cela impose de repenser les prévisions démographiques, mais aussi les politiques familiales. Il faudra aussi faire évoluer les mentalités, pour que le choix de ne pas avoir d’enfants ne soit plus vu comme une anomalie.
Conclusion – Une liberté qui dérange encore

La décision de ne pas avoir d’enfants est souvent libre, éclairée, et assumée. Elle ne relève pas d’un drame personnel, mais d’un nouveau modèle de vie. Pourtant, les institutions et la société dans son ensemble tardent à intégrer cette réalité. Ce n’est pas une mode ni un rejet de la famille : c’est une transformation en profondeur. Si nous ne nous adaptons pas, les décalages entre les besoins réels et les réponses sociales risquent de s’accentuer. Et avec eux, les tensions.